mardi 2 janvier 2007

La baisse du chômage : vérité ou intox ? Les propositions de l'UDF.

Le vendredi 29 décembre 2006, le Ministère de l'Emploi a annoncé une baisse générale de 0,8% des chômeurs de catégorie 1 pour le mois de novembre. Sur un an, le taux de chômage atteindrait l'ordre de 8,7% au sens du BIT (Bureau International du Travail1), ramenant à 2 112 300 le nombre de demandeurs d’emploi. Mais il y a 8 catégories, qu’en est-il des 7 autres ?


Le site de l’ANPE définit les catégories sur cette page. Une catégorie prend en compte, depuis le 5 mai 1995 :

  • la situation de l'usager vis-à-vis de l'emploi (usager sans ou avec emploi),

  • la disponibilité pour occuper un emploi,

  • la nature de l’emploi recherché (emploi à plein temps à durée indéterminée ; emploi à temps partiel ; emploi à durée déterminée),

  • l'obligation ou non de justifier de l'accomplissement d'actes positifs de recherche d’emploi.

La catégorie 1 constitue l'ensemble "des personnes sans emploi, immédiatement disponibles, tenues d’accomplir des actes positifs de recherche d’emploi, à la recherche d’un emploi en CDI à plein temps."

Sont exclues des statistiques les personnes :

  • à la recherche d’un emploi en CDD où à temps partiel,

  • en formation ou en maladie,

  • occupant un emploi intérimaire, en CDD ou à temps partiel et recherchant un travail en CDI à temps plein,

  • le tiers des personnes au RMI non inscrites à l’ANPE (plus de 400 000 personnes),

  • les dispensés de recherche d’emploi (âgés de 57,5 ans ou plus),

  • les personnes non inscrites comme à la recherche d’un emploi, dont il est difficile de dégager une statistique (sans domicile fixe, titulaire des minima sociaux autres que le RMI où l’ASS, personnes sans droit à allocation, conjoint(e) sans ressource, les jeunes de moins de 25 ans).


Tout cela représenterait plus de 2,7 millions de personnes, appelées "chômeurs invisibles", selon le site ActuChomage. Cela représente, de façon non-exhaustive (chiffres donnés par ACDCAutres Chiffres Du Chômage) :

  • les intérimaires, les temps partiels et les CDD (plus de 800 000 personnes),

  • les demandeurs d’emploi en "activité réduite" (travaillant plus de 78h dans un mois, représentant environ 452 000 personnes) et les personnes âgées de plus de 55 ans dispensées de la recherche d’emploi (environ 412 000 personnes),

  • les chômeurs des DOM (plus de 200 000),

  • les chômeurs en arrêt-maladie ou en formation (321 000),

  • les licenciés économiques en convention de reclassement personnalisé ou en contrat de transition professionnelle,

  • les RMIstes ne pointant plus à l’ANPE (environ 481 000)

On a d’un côté une explosion du nombre des RMIstes (+20% depuis 2003), et d’un autre 47% de chômeurs qui ne sont plus indemnisés. On atteindrait alors un minimum de 5 millions de chômeurs. Ca veut dire, au minimum, 8% de la population Française (source INSEE : 62,7 millions de Français en 2005), 18,1% de la population ACTIVE (source INSEE : 27,637 millions de Français en 2005). Et le gouvernement se pavoise de son 8,7% de taux de chômeurs de catégorie 1 !

En 2005 on parlait déjà de 8 854 700 chômeurs, soit 20,9% de la population active : http://travail-chomage.site.voila.fr/chomage/chom_reel2005.htm

Pourquoi est-ce qu’on ne retrouve pas ce chiffre ? Pourquoi est-ce que tout le monde s’obstine à parler de ces fameux 8% ? Faut-il aller jusqu’à un 2nd novembre 2005 pour qu’on obtienne enfin la vérité ?


Il faut savoir que c’est dans l’intérêt du gouvernement d’obtenir les chiffres les plus bas possibles pour se faire bien voir, et une fois de plus faire de la propagande aux Français. Chaque année, des pressions sont faites au sein des organismes tels que l’INSEE et l’ANPE pour faire baisser au maximum les résultats (déclassement des chômeurs…) et l’UNEDIC pour faire cesser les aides (vous rappelez-vous l’histoire des recalculés ?).


Les deux partis principaux, l’UMP et le PS, se donnent comme objectif de faire baisser le taux du chômage à moins de 5% en 2012. Inutile de chercher plus loin, ils parlent des chômeurs de catégorie 1, ce qui laisse le champ libre à n’importe quel type de manipulation, comme c’est le cas depuis 1981. Leurs mesures ne sont franchement pas rassurantes. On connait les prouesses du PS pour créer des emplois faussement stables (combien de fois j’ai entendu des personnes sortant des emplois jeunes dire qu’elles ne trouvaient pas de travail car les 5 années qu’elles ont passé n’étaient aucunement valorisantes) et les aptitudes de l’UMP pour les reclassements (le président de l’UMP en a fait sa spécialité après ses passages au Ministère de l’Intérieur – bilans truqués – et au Ministère de l’Economie – aviez-vous vraiment gagné 2% dans vos tickets de caisse ?)


L’UDF se démarque en faisant les propositions suivantes, après le constat fait par Bayrou suite à l’interview réalisée par ActuChomage :

François Bayrou : La baisse du chômage est principalement due à la démographie, au fait que des classes plus nombreuses partent à la retraite. C'est une baisse du chômage statistique car, comme vous le savez, nous avions 2,360 millions de chômeurs en 2002 et nous en avons 2,4 millions aujourd'hui, mais les RMIstes sont passés de 1 à 1,3 million et ils ne sont pas tous comptés dans les statistiques du chômage (Nous lui confirmons que seulement 37% d'entre eux pointent à l'ANPE- ndlr). Ceci est une faiblesse. Je considère qu'il y a à peu près 4 millions de personnes sur le bord de la route, en incluant les minima sociaux divers et variés (Nous lui rappelons également que 411.000 "seniors" sont dispensés de recherche d'emploi et ne sont pas comptabilisés dans les chiffres - ndlr). Cette situation n'a pas changé pour ainsi dire depuis 2002, malgré les cycles d'une croissance qui est plutôt molle, quand elle n'est pas en panne… Donc, pour moi, il n'y a pas de véritable baisse du chômage.

Ainsi, l’UDF propose dans son programme législatif de :

  • multiplier le travail et augmenter le pouvoir d’achat : assouplissement des heures (heures supplémentaires à charges égales),

  • transférer des charges pesant sur le travail : TVA sociale ou CSG ou combinaison des deux, fiscalité sur les énergies fossiles,

  • aider à la création d’entreprise,

  • créer un "small business act" à la française pour les PME,

  • créer un contrat formation emploi pour les jeunes,

  • créer un compte épargne formation,

  • lutter contre les discriminations à l’embauche et dans les entreprises.


Ces mesures ont été déterminées suite à un colloque mené par l’UDF sur le thème de l’emploi. Elles misent plus sur la liberté de travailler et d’entreprendre, sans oublier le caractère social. Elles méritent d'être développée dans un prochain article.

D’autres mesures viendront, mais gageons que celles-ci ont le mérite de se distinguer des discours traditionnels de gauche et de droite, et donc de proposer une réelle nouveautée.


Sources :

ActuChomage :


Débat2007 : L’Emploi : proposition des différents partis


Association pour la Valorisation des Relations avec les Professionnels : La FIDES veut mobiliser les pouvoirs publics sur la question du chômage des « quinqua »


Quelques chiffres :


Blogs :


L’Humanité : La vérité sur les chiffres du chômage



1 La définition du site de l'INSEE précise que le BIT "harmonise les concepts et définitions relatives au travail et à l'emploi, en particulier celles relatives à la population active occupée et aux chômeurs". Cette notion est déclinée dans le sens du BIT : "comprend les personnes (âgées de 15 ans ou plus) ayant travaillé (ne serait-ce qu'une heure) au cours d'une semaine de référence, qu'elles soient salariées, à leur compte, employeurs ou aides dans l'entreprise ou l'exploitation familiale. (...) Les militaires du contingent, les apprentis et les stagiaires rémunérés effectuant un travail font partie de la population active occupée.". Comme on peut le voir, n’importe qui est considéré comme faisant parti de la population active.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Très bon article et vous avez bien fait de mentionner un certain nombre de liens.

Voici quelques études notées sur l'un des sites indiqués, études permettant d'alimenter les débats sur le chômage et l'emploi.

* Chômage officiel et chômage réel en 2005
http://travail-chomage.site.voila.fr/chomage/chom_reel2005.htm

* En neuf ans le nombre réel de chômeurs n'a pas baissé en France
http://travail-chomage.site.voila.fr/chomage/chom_reel_1996_2005.htm

* Gains de productivité du travail, durée du travail, chômage
http://travail-chomage.site.voila.fr/produc/gain_productiv.htm

En France, la productivité du travail a augmenté de 17,22 % en sept ans, pour l'ensemble de l'activité nationale. Sans rien changer à la production de richesses du pays, le nombre d'emplois aurait pu être augmenté de 17,22 % en réduisant de 14,69 % la durée réelle du travail. En moyenne, avec des transferts d'emplois entre secteurs d'activité, le nombre d'emplois aurait augmenté de 4 284 500. Le chômage réel aurait beaucoup baissé.

* Plus d'emplois créés en France qu'en Angleterre en 15 ans
http://travail-chomage.site.voila.fr/britan/emploi_15ans.htm

En quinze ans, de 1990 à 2005, la France a créé davantage d'emplois (2 520 000 : +11,25%) que l'Angleterre (1 520 000 : +5,82%). Le modèle libéral britannique n'est donc pas supérieur au modèle social français.

* Manipulation des chiffres du chômage dans un pays du nord
http://travail-chomage.site.voila.fr/danois/dk_merite.htm

En 2004, le Danemark a plus de préretraités (187 200) que la France (139 700) pour une population active dix fois plus faible. Avec les autres mesures de marché du travail, le nombre réel de chômeurs est 2,52 fois le nombre officiel. Le taux de chômage réel devient 14,65 % au lieu d'un taux officiel de 6,38 %.

Avec une évolution de sa population active identique à celle du Danemark depuis quinze ans, non seulement la France n'aurait plus aucun chômeur officiel, mais le chômage réel serait résorbé pour l'essentiel. Et cela sans introduire une plus grande flexibilité des contrats de travail.

* La gauche crée plus d'emplois du secteur privé, à croissance égale
http://travail-chomage.site.voila.fr/emploi/5ans_emploi_prive.htm

* Durée du travail : apparences et réalité, France et autres pays
http://travail-chomage.site.voila.fr/emploi/duree_travail.htm

Si l'on fait la moyenne de tous les emplois, à temps partiel et à temps complet, la durée de la semaine de travail est :
- 36,3 h en France
- 36,2 h en Italie
- 35,1 h au Danemark
- 33,6 h en Allemagne
- 33,2 h en Espagne
- 31,7 h en Grande-Bretagne
- 30,1 h en Suède (36,1 h pour ceux "au travail")
- 29,2 h aux Pays-Bas
- 33,8 h aux Etats-Unis

Un site bien documenté, à consulter.

Christophe a dit…

Je vous remercie pour vos précisions. Il y a, en effet, de quoi alimenter un débat sur les politiques d'emploi.